Passage de 36 à 48 équipes en Coupe du Monde : Coup électoral ?

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Le football mondial change encore de visage. En 2026, la planète ballon rond accueillera 48 équipes en Coupe du Monde. Une décision historique, oui, mais aussi hautement politique. Derrière les chiffres et les sourires, une autre réalité se cache : celle d’un coup électoral savamment orchestré par Gianni Infantino, le patron incontesté de la FIFA.

Passage de 36 à 48 équipes en Coupe du Monde : Coup électoral ?

Crédits : 2024 FIFA

Le décor est planté : plus d’équipes, plus de matches, plus d’argent. Mais à quel prix ?

Un élargissement calculé au millimètre

Gianni Infantino n’a jamais laissé le hasard dicter sa feuille de route. Depuis son arrivée à la tête de la FIFA en 2016, il a promis un football plus inclusif. En mars 2023, la FIFA officialise donc le nouveau format : 48 équipes réparties en 12 groupes de 4. Les deux premiers de chaque groupe, plus les huit meilleurs troisièmes, fileront en seizièmes de finale. Résultat : 104 matches au total, sur 56 jours de compétition. Deux fois plus long, deux fois plus intense… ou deux fois plus fatigant, selon le point de vue. Ce nouveau format ne doit rien au hasard. Il s’inscrit dans une logique de conquête. Conquête d’audience, mais surtout conquête politique.

La promesse d’un homme en quête de pouvoir

En 2016, Infantino a un plan. Il promet d’ouvrir la Coupe du Monde à plus de nations. Pour les 211 fédérations membres de la FIFA, c’est une aubaine : plus de chances de qualification, plus de visibilité, plus d’argent. Et forcément, plus de votes favorables. Un calcul simple, presque trop évident. Un expert résumait la manœuvre d’une phrase : « Si vous offrez 16 places supplémentaires à vos électeurs, vous gagnez les élections avant même de voter. » Pari gagné : Infantino a été réélu sans opposition en 2019, puis de nouveau en 2023, cette fois par acclamation. L’homme fort du football mondial a compris la mécanique du pouvoir : offrir pour régner.

48 équipes en Coupe du Monde : une manne financière colossale

Derrière la politique, le nerf de la guerre reste l’argent. Et sur ce point, la FIFA n’a rien laissé au hasard. L’organisation prévoit un chiffre record de 11 milliards de dollars pour le cycle 2023-2026. C’est 4,5 milliards de plus que lors du cycle précédent. L’expansion à 48 équipes génère, à elle seule, près de 640 millions de dollars de recettes supplémentaires. Les droits TV explosent, le marketing flambe, et la billetterie atteint des sommets. Sous l’ère Infantino, la FIFA est devenue une véritable machine à cash. Fin 2022, ses réserves s’élevaient à près de 4 milliards de dollars. Plus que jamais, le football mondial roule sur l’or. Mais cet or, à qui profite-t-il vraiment ?

Une redistribution qui redessine la carte du monde

Ce passage à 48 équipes n’est pas seulement une affaire de gros sous. Il redessine la géographie du football mondial. L’Europe passe de 13 à 16 places, l’Afrique bondit de 5 à 9, l’Asie double presque son quota avec 8 représentants. L’Amérique du Nord, du Sud et même l’Océanie en profitent. Pour Infantino, ce rééquilibrage est un argument imparable : donner leur chance aux nations oubliées. Mais derrière le discours d’ouverture, une autre lecture s’impose. L’Afrique et l’Asie représentent les zones les plus stratégiques pour la FIFA. Des régions jeunes, passionnées, en pleine expansion. Autrement dit, des territoires électoraux à conquérir.

Les voix dissonantes s’élèvent

Tout le monde ne partage pas l’enthousiasme d’Infantino. Sepp Blatter, son prédécesseur, n’a pas mâché ses mots : « C’est mauvais pour le football. » Pour lui, le format à 32 équipes était parfait, équilibré, cohérent. Karl-Heinz Rummenigge, figure du Bayern et de l’Association européenne des clubs, dénonce quant à lui une décision purement politique. Le risque, selon lui, est clair : une compétition diluée, moins intense, moins prestigieuse. Et ce n’est pas tout. Le syndicat des joueurs, la FIFPRO, alerte sur les conséquences physiques pour les footballeurs. Plus de matches, plus de voyages, moins de repos. Le calendrier est déjà saturé, et cette nouvelle inflation de rencontres menace la santé des joueurs.

Une manœuvre électorale bien huilée

Infantino a compris que le pouvoir ne se gagne pas seulement sur les pelouses. Il se gagne dans les urnes, dans les promesses, et dans la redistribution des privilèges. En offrant à chaque continent un peu plus de visibilité, il a verrouillé son empire. Les votes unanimes du Conseil de la FIFA en sont la preuve : l’expansion n’a rencontré aucune résistance. Ses opposants sont réduits au silence, ses soutiens renforcés. Cette stratégie d’inclusion, présentée comme démocratique, cache un objectif clair : asseoir un pouvoir sans partage.

L’ambition sans fin d’un président

Mais Infantino ne compte pas s’arrêter là. Des discussions existent déjà pour porter le nombre de participants à 64 en 2030, année du centenaire du tournoi. Une idée soutenue par la CONMEBOL, farouchement combattue par l’UEFA. Si elle venait à voir le jour, cette inflation finirait de transformer la Coupe du Monde en un marathon mondial. L’ambition est claire : faire du football un instrument de diplomatie globale. Comme le dit un analyste, « le ballon rond ne peut plus se limiter à l’axe Europe-Amérique du Sud ». Infantino veut un football multipolaire, étendu à toutes les régions du globe. Une idée séduisante, mais dangereuse si elle sacrifie la qualité au profit du nombre.

De 16 à 48 : un siècle d’expansion

Depuis 1930, la Coupe du Monde n’a cessé de grandir. 16 équipes au départ, 24 à partir de 1982, puis 32 depuis 1998. En 2026, ce seront 48. L’histoire du tournoi raconte celle d’une croissance continue, mais aussi celle d’un équilibre fragile entre sport et politique. Sous Infantino, cette évolution s’accélère. En un peu plus d’une décennie, le football est devenu un outil de pouvoir mondial, plus que jamais lié aux ambitions de son dirigeant.

Un coup électoral assumé

Impossible de le nier : ce passage à 48 équipes en Coupe du Monde est un coup électoral. Une stratégie brillante pour certains, une dérive pour d’autres. Infantino a consolidé son trône, accru les revenus de la FIFA et ouvert la porte à des nations jusque-là absentes. Mais à quel coût pour le spectacle, la fatigue des joueurs et la cohérence sportive ? Les tensions entre pouvoir, argent et passion sont plus vives que jamais. Le football mondial s’élargit, mais risque de se perdre en chemin. Une chose est sûre : cette mutation ne fait que commencer. Et si la prochaine bataille se jouait, non pas sur le terrain, mais dans les coulisses de la FIFA ?

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