Affaire des 23 enfants footballeurs envoyés au Laos

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L’affaire des 23 Enfants footballeurs envoyés au Laos a bouleversé le football mondial. Derrière des promesses sportives se cachait une mécanique d’exploitation méthodique. Ce scandale a révélé les failles profondes du système de protection des mineurs.

Le football nourrit des rêves universels. Pourtant, certains rêves basculent dans l’ombre. En 2015, vingt-trois enfants africains ont découvert l’envers du décor, loin des projecteurs.

Affaire des 23 enfants footballeurs envoyés au Laos

Affaire des 23 enfants footballeurs envoyés au Laos

Quand le rêve du football devient un piège organisé

Tout commence en Afrique de l’Ouest. Le Liberia, le Ghana et la Sierra Leone fournissent l’essentiel du contingent. Les jeunes joueurs ont entre 13 et 17 ans. Ils rêvent d’Europe, de stades pleins, de contrats professionnels. Pourtant, la destination finale se situe au Laos, pays marginal sur la carte du football mondial.

Alex Beyam Karmo joue un rôle central. Ancien international libérien, il inspire confiance. Il se présente comme capitaine d’un club laotien en pleine expansion. Les discours sont rodés, précis, séduisants. Mille dollars promis, un ordinateur portable, des primes d’entraînement, une éducation scolaire. Et ce n’est pas tout. Les frais de voyage sont annoncés comme intégralement remboursés.

Pourtant, derrière ces mots, la structure n’existe pas. L’académie annoncée n’est qu’une façade. Aucun enregistrement officiel. Aucun contrôle. Le piège se referme lentement.

L’arrivée au Laos et le choc de la réalité

Février 2015 marque le basculement. Trente joueurs arrivent à Pakse, dans le sud du Laos. Parmi eux, entre 21 et 23 mineurs selon les sources. Très vite, la désillusion est totale. Les logements sont insalubres. Trente jeunes entassés dans une salle sans fenêtres. Pas de verrous. Des matelas posés au sol.

L’alimentation choque. Deux repas quotidiens, souvent limités au riz et au pain. L’entraînement est intense. Deux séances par jour. Pourtant, aucun match officiel. L’académie n’est pas reconnue. Les joueurs ne peuvent pas être alignés légalement.

La santé devient un enjeu vital. Aucun médecin. Aucun soigneur. Certains contractent la malaria ou la typhoïde. Les soins promis n’existent pas. Pourtant, la pression continue. Les passeports sont confisqués. La liberté disparaît.

Témoignages glaçants et vies brisées

Les mots des jeunes résonnent encore. Mohammed Kesselly Kamara n’a que 14 ans. Il décrit une promiscuité insupportable. Dormir à trente dans une pièce unique. Respirer l’humidité. Supporter la fatigue. Pourtant, il joue. Il marque même un but en championnat. Un paradoxe cruel.

D’autres parlent de travail d’esclave. Les promesses financières ne sont jamais tenues. Certains ne reçoivent aucun paiement. La peur domine. Peur d’échouer. Peur de rentrer au pays sans succès. Pour six mineurs, cette peur est plus forte que tout. Ils restent.

Pourtant, la réalité administrative rattrape le groupe. En mars 2015, les visas expirent. Les joueurs deviennent des immigrés illégaux. Le danger augmente. L’isolement s’intensifie.

Les violations majeures des règles FIFA

Cette affaire des 23 Enfants footballeurs envoyés au Laos révèle une accumulation de violations graves. La FIFA est formelle. Les transferts internationaux de mineurs sont strictement encadrés. L’article 19 l’interdit presque totalement. Pourtant, les règles sont contournées.

Des mineurs participent à des matchs officiels. C’est interdit. Aucun Certificat International de Transfert n’est délivré pour certains joueurs. L’enregistrement est irrégulier. Le Transfert Matching System, censé alerter, ne détecte rien. Mais attention. Ce silence technique interroge profondément.

Les exceptions réglementaires existent. Elles sont détournées. Des emplois fictifs créés pour les familles. Des adoptions légales utilisées comme alibi juridique. Le système craque.

Le rôle décisif des lanceurs d’alerte

Sans journalistes, l’affaire serait restée invisible. Wleh Bedell joue un rôle clé. Promoteur sportif, il accompagne le groupe. Rapidement, il comprend l’absurdité. Pas d’entraîneur qualifié. Pas de médecin. Karmo contrôle tout. Il alerte, parle et décrit une académie fictive.

La BBC enquête. En juillet 2015, le scandale éclate publiquement. Les témoignages sortent. Les images choquent. La pression internationale monte. FIFPro intervient. La FIFA ne peut plus ignorer.

Stéphane Burchkalter s’étonne publiquement. Comment un club laotien peut attirer autant de mineurs sans déclencher d’alerte. Pourtant, cette affaire n’est pas isolée. Pour FIFPro, elle n’est que la partie émergée de l’iceberg.

Sanctions tardives et responsabilités diluées

Il faut attendre avril 2018. Trois ans après les faits. La FIFA sanctionne la Fédération de Football du Laos. Amende de 690 000 francs suisses. Une somme lourde pour une petite fédération. Les motifs sont clairs. Transferts illégaux. Mauvais contrôle. Défaut de discipline du club.

Pour Champasak United, les sanctions restent floues. Les sources publiques manquent de détails. Cette opacité interroge. Pourtant, la responsabilité collective est engagée. Les fédérations, les clubs, les intermédiaires. Tous ont failli.

Musa Bility, président de la Fédération libérienne, admet des erreurs. Mais l’aveu arrive tard. Les dégâts sont déjà faits.

Un système mondial d’exploitation des mineurs

Jean-Claude Mbvoumin va plus loin. Pour lui, l’affaire des 23 Enfants footballeurs envoyés au Laos n’est qu’un symptôme. Chaque année, 15 000 adolescents quittent l’Afrique de l’Ouest. Beaucoup illégalement. Ils rêvent de contrats. Ils trouvent souvent l’abandon.

Cinq cent mille enfants s’entraînent dans des académies, structurées ou non. Le contrôle est quasi inexistant. Des organisations organisent des campagnes massives de recrutement. Les jeunes deviennent une marchandise sportive.

Pourtant, peu de sanctions existent. Le FC Barcelone a été puni. Mais combien d’autres cas passent sous silence. Le système favorise l’impunité.

Quelles protections pour éviter un nouveau drame

Des solutions existent. Elles demandent une volonté forte. Créer des centres d’information en Afrique. Expliquer les réalités du football professionnel. Renforcer les fédérations locales. Contrôler les académies. Prévenir plutôt que sanctionner après coup.

La Charte du Football Solidaire propose un cadre. Encore faut-il l’appliquer. Sans vigilance, d’autres enfants tomberont dans le même piège.

Cette affaire restera un marqueur. Un rappel brutal que le football peut détruire autant qu’il fait rêver. Le prochain combat concerne désormais la responsabilité des grandes institutions face à ces dérives persistantes.

Sources : BBC, FIFPRO, FIFA, France Terre d’Asile

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