Guangzhou FC, le géant déchu exclu du monde professionnel

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Pendant plus de dix ans, Guangzhou FC a incarné la toute-puissance du football chinois. Aujourd’hui, le club le plus titré du pays est écarté des championnats professionnels, plombé par les dettes et les salaires impayés. Le choc est immense. Le symbole est fort. Et l’histoire mérite d’être racontée.

Guangzhou FC

Guangzhou FC ne disparaît pas sur un terrain un soir de défaite. Il s’effondre dans un bureau, à la lecture d’une liste officielle. En janvier 2025, la Fédération chinoise tranche. Guangzhou n’a plus de licence professionnelle. Le rideau tombe.

Guangzhou FC interdit de jouer en pro

Début janvier 2025, la Fédération chinoise de football publie la liste des clubs autorisés à évoluer en divisions professionnelles. La CSL, la China League One et la troisième division sont concernées. Un document attendu, scruté, redouté. Guangzhou FC n’y apparaît pas.

Seuls 49 clubs sont admis pour la saison. Guangzhou FC interdit de jouer en pro, comme Cangzhou Mighty Lions et Hunan Xiangtao. La raison est claire. Les critères financiers ne sont pas respectés. Les dettes s’accumulent. Les salaires ne sont plus payés.

Le club réagit rapidement. Guangzhou confirme ne pas avoir obtenu la licence professionnelle pour 2025. Le dossier administratif était conforme. Mais l’essentiel était ailleurs. L’équilibre financier n’existait plus. La sanction est immédiate. Le statut professionnel est perdu.

Une décision lourde de sens

La CFA justifie son choix sans détour. Elle évoque des arriérés de dettes persistants et des salaires impayés. Elle pointe aussi des opérateurs liés au club, classés mauvais payeurs dans les registres judiciaires. Le risque opérationnel est jugé trop élevé.

Pour la Fédération, il n’y a pas de place pour l’approximation. La crédibilité du championnat est en jeu. Autoriser Guangzhou aurait envoyé un mauvais signal. Mais attention. La décision dépasse le simple cadre réglementaire. Elle acte la fin d’un modèle entier.

Guangzhou reconnaît lui-même la gravité de la situation. Dans un communiqué, le club admet que les fonds levés n’ont pas suffi. Le passif historique est trop lourd. Les efforts entrepris n’ont pas permis de combler le gouffre financier.

Evergrande, du moteur au fardeau

Derrière l’interdiction de Guangzhou FC de jouer en pro, un nom revient sans cesse. China Evergrande. Le conglomérat immobilier rachète le club en 2010, après une relégation en deuxième division. L’ambition est immédiate. Les moyens semblent illimités.

Evergrande fait de Guangzhou sa vitrine sportive. Les investissements explosent. Le club devient le symbole d’une stratégie nationale basée sur l’argent et l’impact médiatique. Mais cette dynamique repose sur un géant aux pieds d’argile.

La dette d’Evergrande dépasse les 300 milliards de dollars. À partir de 2021, le financement du football s’effondre. Les flux se tarissent. Guangzhou se retrouve seul face à ses charges. Les salaires ne suivent plus. Les dettes s’empilent.

Le lien est direct. La CFA le sait. Le club le reconnaît. La chute d’Evergrande entraîne celle de Guangzhou. Une mécanique implacable. Et ce n’est pas tout. Cette dépendance extrême révèle les failles structurelles du football chinois.

Le palmarès d’un géant incontesté

Ce qui rend l’exclusion de Guangzhou si brutale, c’est son palmarès. Huit titres de champion de Chine entre 2011 et 2019. Huit sacres en neuf saisons. Une domination rarement vue dans l’histoire du championnat.

Guangzhou devient rapidement la référence nationale. Le club attire les projecteurs, les sponsors, les supporters. Il impose son rythme. Il écrase la concurrence. Dans l’ère professionnelle chinoise, personne ne fait mieux.

Sur la scène continentale, Guangzhou frappe encore plus fort. Deux Ligues des champions d’Asie remportées en 2013 et 2015. Le club offre à la Chine une reconnaissance asiatique inédite. Il devient la vitrine du pays sur le continent.

C’est ce palmarès, mêlé à son poids économique et médiatique, qui forge son statut de plus grand club de Chine. Et c’est précisément ce géant-là qui disparaît aujourd’hui du paysage professionnel.

Les années d’excès assumés

À partir de 2010, Guangzhou incarne une politique de dépenses sans retenue. Gros transferts. Salaires XXL. Recrutement d’internationaux confirmés. Le club paie souvent au-dessus des prix du marché. L’objectif est clair. Gagner vite et fort.

Guangzhou attire des entraîneurs champions du monde. Marcello Lippi d’abord. Luiz Felipe Scolari ensuite. Des noms qui parlent à toute la planète football. Sur le terrain, des stars européennes et sud-américaines débarquent.

Cette fuite en avant s’inscrit dans une vision politique plus large. Faire de la Chine une puissance majeure du football mondial. Se qualifier régulièrement. Accueillir un jour la Coupe du monde. Et, pourquoi pas, la gagner.

Mais attention. Derrière les trophées, le modèle économique reste fragile. Les recettes ne suivent pas les dépenses. Le club vit sous perfusion. Tant que l’argent coule, tout tient. Quand il s’arrête, tout s’effondre.

Le lent déclin sportif

Le retrait progressif d’Evergrande marque le début de la descente. Guangzhou perd ses meilleurs joueurs. Les entraîneurs quittent le navire. Le niveau chute. En 2022, le club est relégué de la CSL vers la China League One.

La saison 2023 confirme les difficultés. Guangzhou termine à la 12e place de deuxième division. Loin des ambitions passées. Loin de la montée. Le club tente de se reconstruire avec des moyens limités.

En 2024, un léger sursaut apparaît. Guangzhou termine troisième de China League One. L’espoir renaît. Mais la montée échappe encore. Yunnan Yukun et Dalian Yingbo passent devant.

Sportivement, le club montre des signes de vie. Administrativement, la situation est déjà condamnée. Quelques semaines plus tard, la licence est refusée. Le terrain ne peut plus sauver le club.

La fin d’une époque pour tout un football

L’éviction de Guangzhou est perçue comme la fin d’un cycle. Celui des clubs détenus par des promoteurs immobiliers surendettés. Des projets construits sur une bulle spéculative plutôt que sur un modèle durable.

Les autorités du football chinois veulent tourner la page. Plafonnement des salaires. Contrôle strict des licences. Priorité donnée à la formation. Réduction des dépenses irrationnelles. Le message est désormais clair.

En quelques saisons, plusieurs clubs majeurs ont disparu ou été rétrogradés pour raisons financières. La crédibilité du championnat a été fragilisée. Mais cette crise ouvre aussi une porte. Celle d’un système plus sain.

Guangzhou FC quitte la scène professionnelle par la petite porte, laissant derrière lui des titres, des excès et des leçons, annonçant déjà le prochain débat sur l’avenir du football chinois.

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A propos Lionel P 94 Articles
Je m'appelle Lionel et depuis toujours, le sport occupe une place essentielle dans ma vie. Mais c’est le football qui nourrit ma passion la plus profonde. Je n’ai jamais considéré ce sport comme un simple jeu, car il représente pour moi une véritable école de vie, de collectif, de passion et de dépassement de soi. J’aime suivre les grands championnats européens et découvrir les nouveaux talents qui émergent saison après saison. Cette passion naturelle pour le ballon rond m’a conduit à rejoindre Florent et l’équipe éditoriale de Topicfoot. J’y partage mes recherches sur les grandes figures qui ont marqué l’histoire du football et des écris sur les moments fondateurs qui ont façonné ce sport le tout à travers des articles réguliers et variés. Je m’intéresse aussi avec curiosité aux évolutions tactiques, technologiques ou culturelles qui transforment constamment le paysage du football moderne. Écrire sur ce sport est pour moi une manière d’allier plaisir, exigence et curiosité. Le football possède une richesse qui dépasse largement le cadre du terrain, et j’éprouve un réel plaisir à en explorer toutes les dimensions, des légendes d’hier aux innovations d’aujourd’hui, afin d’offrir aux lecteurs de Topicfoot un regard sincère, documenté et passionné. Alors bonne lecture à tous !!