Trois footballeurs équatoriens tués en septembre 2025

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Trois footballeurs équatoriens tués en moins d’un mois. Un drame qui illustre l’explosion de violence en Équateur.

Trois footballeurs équatoriens tués en septembre 2025 : l'Équateur frappé par une violence sans précédent

Le pays andin, jadis considéré comme une terre de football en pleine ascension, vit désormais au rythme des balles perdues et des règlements de comptes. La tragédie dépasse le cadre sportif et met en lumière une insécurité qui gangrène toute la société.

Une série noire qui choque le pays

Le 19 septembre 2025, Jonathan González est tombé sous les balles dans la province d’Esmeraldas. L’ancien international de 31 ans, passé par le Mexique et le Paraguay, a été retrouvé sans vie dans une maison de la côte équatorienne. Son décès n’a pas seulement endeuillé le football, il a souligné à quel point l’Équateur est devenu dangereux. Dix jours plus tôt, le 10 septembre, deux autres joueurs avaient déjà payé le prix de cette violence aveugle. Maicol Valencia, 21 ans, et Leandro Yépez, 33 ans, évoluaient tous deux à Exapromo Costa, en deuxième division. Leur mort dans une attaque armée à Manta a choqué le vestiaire et plongé leurs proches dans l’incompréhension. Le club a parlé de « victimes collatérales », un terme glaçant qui résume la brutalité d’un contexte où la vie d’innocents ne tient plus qu’à un fil.

Des statistiques qui donnent le vertige

Ce n’est pas un hasard si les footballeurs équatoriens tués deviennent tristement le symbole d’un pays en crise. L’Équateur affiche un taux d’homicides parmi les plus élevés d’Amérique latine. Il est passé de 6 pour 100 000 habitants en 2018 à 47 en 2023. L’année 2024 a suivi la même pente dramatique, et 2025 s’annonce pire encore. En janvier et février, plus de 1 500 homicides ont déjà été recensés. Le premier semestre a comptabilisé 4 619 meurtres, soit une hausse de 47% par rapport à l’année précédente. Ces chiffres effarants parlent d’eux-mêmes. Le football, pourtant passion nationale, n’échappe plus à cette spirale sanglante.

Les gangs, maîtres du terrain

Si les footballeurs équatoriens tués font les gros titres, la racine du problème est ailleurs. Les gangs ont pris le pouvoir dans les rues et jusque dans les prisons. Los Choneros, Los Lobos, Tiguerones… leurs noms résonnent comme ceux d’équipes mais ce sont bien des cartels armés. Avec près de 50 000 membres face à une armée et une police en sous-effectif, ils dictent leur loi. L’Équateur, coincé entre la Colombie et le Pérou, est devenu une plaque tournante du trafic de cocaïne. Les ports, notamment Guayaquil, sont des points stratégiques pour l’exportation vers l’Europe et les États-Unis. Résultat : la violence déborde et les victimes s’accumulent.

Esmeraldas et Manta, épicentres de la peur

La mort de Jonathan González à Esmeraldas n’est pas un hasard. Frontalière de la Colombie, cette province vit sous la pression des trafiquants qui utilisent ses routes pour transporter la drogue. Là-bas, la peur est devenue quotidienne. Quant à Manta, ville côtière où Valencia et Yépez ont perdu la vie, elle est elle aussi un théâtre d’affrontements. Guayas, province de Guayaquil, n’est pas en reste. Le surnom donné à la capitale économique, « Guayakill », en dit long sur la situation. Pour les habitants, sortir le soir relève désormais du courage.

Le gouvernement sous pression

Face à cette hécatombe, le président Daniel Noboa multiplie les états d’urgence. Quito, Guayaquil, Manta, Esmeraldas… aucune grande ville n’est épargnée. L’armée est appelée en renfort, avec couvre-feux et contrôles renforcés. Noboa a même parlé d’un pays en « état de guerre » face aux gangs. Mais attention, ces mesures, si spectaculaires soient-elles, n’ont pas encore porté leurs fruits. La violence continue et les familles endeuillées se comptent par milliers. Le football, miroir de la société, pleure ses joueurs fauchés trop tôt.

Le football équatorien dans la tourmente

Les hommages se multiplient sur les terrains. La Fédération équatorienne a publié des messages de soutien, tandis que plusieurs clubs ont organisé des minutes de silence. Mais l’émotion ne suffit pas à masquer la peur. Comment jouer sereinement quand on sait que des footballeurs équatoriens tués peuvent devenir une réalité à chaque déplacement ? La tragédie rappelle celle d’Edwin Espinoza, assassiné en 2020 à Guayaquil. Cinq ans plus tard, l’histoire se répète, mais à une échelle bien plus dramatique.

Le contraste avec la sélection nationale

Paradoxalement, la sélection équatorienne affiche une dynamique positive. Qualifiée avec brio pour la Coupe du monde 2026, elle peut compter sur des stars installées en Europe. Willian Pacho au PSG, Moisés Caicedo à Chelsea, Pervis Estupiñán à l’AC Milan… le vivier est prometteur. Mais ce contraste est saisissant. Alors que l’équipe brille à l’international, le championnat local s’enfonce dans la peur. Les jeunes joueurs qui rêvent d’Europe voient leur quotidien menacé par les balles plutôt que par les défenses adverses.

Quels horizons pour l’Équateur ?

La question dépasse le sport. Les analystes sont clairs : sans réformes profondes, l’Équateur continuera de sombrer. Il faudra s’attaquer à la corruption de la police, renforcer la justice, mais aussi proposer des alternatives sociales pour détourner les jeunes des gangs. Les voisins, Pérou et Colombie, ont déjà renforcé leurs frontières, inquiets de voir la violence déborder. Sur le plan international, l’image de l’Équateur se ternit. Les avertissements aux voyageurs se multiplient et l’économie souffre. Le football, miroir brisé d’une société en crise, incarne cette fracture.

Un pays qui cherche son souffle

Les trois footballeurs équatoriens tués en septembre 2025 ne sont pas seulement des victimes de trop. Ils symbolisent un pays pris au piège, où le sport n’arrive plus à faire oublier la peur. Le ballon roule encore, mais dans l’ombre des fusils. L’Équateur a besoin d’un nouveau souffle, d’une vraie stratégie pour sortir de ce chaos. La suite dépendra de la capacité du pays à trouver l’équilibre entre sécurité, justice et espoir. Et l’histoire pourrait bien nous rappeler que le football reste un baromètre implacable de la société.