Procès Mbappé-PSG : comprendre le conflit

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Procès Mbappé-PSG : Lundi 17 novembre 2025, les prud’hommes de Paris ont été le théâtre d’un affrontement sans précédent dans le football français. Kylian Mbappé réclame 263 millions d’euros à son ancien club pour harcèlement moral et salaires impayés. Le PSG contre-attaque en exigeant 440 millions pour trahison et manquements contractuels. Au total, plus de 700 millions d’euros sont en jeu dans un procès qui pourrait révolutionner les relations entre joueurs et clubs dans l’Hexagone.

Procès Mbappé-PSG : Crédits : Imago IMages

Les origines d’une guerre ouverte

L’affrontement judiciaire entre Kylian Mbappé et le Paris Saint-Germain trouve sa source dans l’été 2023, plus précisément le 12 juin. Ce jour-là, l’attaquant français notifie officiellement au club qu’il refuse d’activer l’option de prolongation d’un an inscrite dans son contrat. Cette décision signifie une chose : il quittera Paris libre à l’issue de la saison 2023-2024, privant ainsi le PSG de toute indemnité de transfert.

La réaction du club est immédiate et radicale. Du 15 juillet au 16 août 2023, Mbappé est placé dans le célèbre « loft » des indésirables. Il est écarté de la tournée de préparation au Japon et s’entraîne séparément du groupe professionnel. Une mise à l’écart qui marque le début d’un divorce particulièrement conflictuel entre les deux parties.

Le 11 août 2023, par l’intermédiaire de son avocate Delphine Verheyden, Mbappé propose un compromis. Il offre de renoncer à 55 millions d’euros bruts de primes, représentant une économie globale de 68 millions pour le club. Les conditions sont précises : réintégration immédiate, signature d’un avenant avant le 14 août à midi et publication d’un communiqué commun. Le PSG ne répond pas dans les délais. L’offre devient caduque selon le camp Mbappé.

Cinq jours plus tard, le 16 août, Mbappé est réintégré dans le groupe professionnel. C’est précisément à ce moment-là que les versions divergent radicalement. Pour le PSG, un accord oral a été conclu, prévoyant que le joueur abandonne 55 millions d’euros en compensation de son départ libre. Pour Mbappé, aucun accord valide n’a jamais existé, faute d’avenant écrit homologué par la LFP.

Procès Mbappé-PSG : Un harcèlement moral dénoncé devant les juges

Lors de l’audience du 17 novembre 2025, les avocats de Mbappé ont dressé un tableau accablant des méthodes employées par le PSG. Maître Cassereau évoque « un fond de méthodes qui s’apparentent à un film de Scorsese » et affirme que « le PSG se croit au-dessus de tout ».

Les accusations sont graves. Le clan Mbappé dénonce une stratégie d’acharnement orchestrée pour forcer le joueur à prolonger contre sa volonté. En juillet 2023, il lui aurait été dit qu’il ne rejouerait pas de la saison si il persistait dans son refus. La pression ne s’est pas relâchée : mise à l’écart pour la première journée de Ligue 1, courrier du club évoquant que sa décision pourrait conduire à des licenciements au sein de l’institution.

Mais l’élément le plus marquant concerne son petit frère, Ethan Mbappé. Selon onze mondial, L’avocate révèle que Kylian aurait retrouvé son cadet « en larmes dans les vestiaires » après avoir subi des « brimades » de la part du club. « C’est la chose qui m’a le plus affecté », avait confié Kylian fin 2024, évoquant les conséquences du conflit sur son frère. Suite au départ de l’aîné, Ethan n’a pas reçu de prolongation et a dû rebondir à Lille.

Le camp Mbappé évoque également une « armée numérique » constituée par le club pour harceler l’attaquant et faire de lui « la bête noire des supporters du PSG », en référence à une enquête de Mediapart. Les avocats affirment que « tous les ingrédients sont réunis » pour caractériser un harcèlement moral : mise à l’écart, non-participation forcée à plusieurs matchs, pression psychologique constante.

Le joueur aurait été « énormément affecté pendant une grosse année », et ses capacités athlétiques « altérées après avoir subi la pression ». L’avocate précise : « Tout ce qui a été dit sur le harcèlement moral correspond vraiment à une souffrance du joueur ».

Les 263 millions réclamés par Mbappé

Au départ, Kylian Mbappé réclamait 55 millions d’euros au PSG, correspondant à des salaires et primes qu’il estime impayés. Cette somme se décompose en plusieurs éléments : 36,66 millions d’euros bruts pour le dernier tiers de la prime de signature, 18,75 millions d’euros pour trois mois de salaires impayés d’avril à juin 2024, et 1,5 million d’euros de primes d’éthique.

Ces montants sont inscrits dans un avenant contractuel signé le 21 mai 2022 et homologué par la LFP. Pour l’équipe juridique de Mbappé, le contrat est clair et doit être respecté, indépendamment de tout accord oral prétendument conclu ultérieurement.

Mais devant les prud’hommes, les demandes ont pris une ampleur considérable. Le montant total atteint désormais 263 millions d’euros. Cette somme inclut une demande de requalification du CDD en CDI, qui permettrait au joueur de faire valoir des droits équivalents à ceux d’un salarié classique.

Le détail des 263 millions se compose ainsi : les 55 millions initiaux de salaires et primes, 44,6 millions d’euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 37,5 millions d’euros pour harcèlement moral, 19 millions d’euros de rappels de salaires et de congés payés pour avril à juin 2024, ainsi que des compensations de préavis et les conséquences financières de la requalification en CDI.

La stratégie juridique : la requalification en CDI

La demande de requalification du CDD en CDI constitue le cœur de la stratégie juridique de Mbappé. Cette approche s’inspire directement du précédent Adrien Rabiot, qui avait obtenu gain de cause contre le PSG en juin 2025.

Adrien Rabiot avait été écarté du groupe durant la saison 2018-2019 après avoir refusé de prolonger son contrat. La cour d’appel de Paris avait requalifié son contrat en CDI et accordé au joueur 1,3 million d’euros, dont 341 000 euros spécifiquement pour la requalification. Cette victoire a créé un précédent juridique que Mbappé entend exploiter.

Pour l’avocate de Mbappé, Delphine Verheyden, les arguments sont clairs : « En droit du travail, la loi exige que, pour modifier la rémunération ou la durée d’un contrat, un avenant soit signé. Le règlement du football exige en plus que cet avenant soit homologué dans les 15 jours de sa signature ». Puisque ces formalités n’ont pas été respectées, « toutes les discussions sont nulles et non avenues ».

La loi du 27 novembre 2015 a certes renforcé les CDD des sportifs professionnels, rendant les requalifications exceptionnelles. Cependant, la jurisprudence montre qu’une requalification reste possible si le club a commis des manquements graves vidant le CDD de sa substance. La mise à l’écart prolongée constitue précisément ce type de manquement.

Si Mbappé obtenait gain de cause sur ce point, les conséquences seraient considérables pour le football français. Un joueur en CDI pourrait rompre son contrat avec préavis sans indemnité de transfert. Les clubs devraient justifier chaque rupture par un motif réel et sérieux, rendant les mises à l’écart beaucoup plus risquées. Le modèle contractuel du football professionnel français serait profondément bouleversé.

La contre-offensive du PSG : 440 millions d’euros

Face aux accusations, le PSG a choisi la contre-attaque totale. Le club réclame 440 millions d’euros à son ancien attaquant. Ce montant astronomique se décompose en plusieurs postes.

– 20 millions d’euros de préjudice à l’image.
– 60 millions pour mauvaise foi dans l’exécution de l’accord d’août 2023.
– 180 millions pour la dissimulation de cet accord.
– 180 millions de perte de chance pour transférer le joueur.

L’argument central du PSG repose sur une offre du club saoudien Al-Hilal en juillet 2023. Selon le club parisien, cette offre s’élevait à 300 millions d’euros. Mbappé aurait refusé ce transfert, privant ainsi le PSG d’une indemnité colossale. Le club estime avoir perdu une chance de le transférer à hauteur de 180 millions d’euros.

Les avocats du PSG affirment que le joueur « a agi de manière déloyale, en dissimulant pendant près de onze mois, entre juillet 2022 et juin 2023, sa décision de ne pas prolonger son contrat, privant ainsi le club de toute possibilité d’organiser un transfert ». Ils ajoutent : « On a quelqu’un de déloyal, qui savait dès juillet 2022 qu’il ne voulait pas prolonger ».

Le club s’appuie également sur une déclaration publique de Mbappé en janvier 2024. Interrogé en zone mixte au Parc des Princes, le joueur avait déclaré :

« Avec l’accord que j’ai passé avec le président cet été, peu importe ma décision, on a réussi à protéger l’ensemble des parties et préserver la sérénité du club pour les défis à venir ».

Pour le PSG, cette phrase prouve l’existence de l’accord verbal contesté par le joueur.

Dans un communiqué publié après l’audience, le club affirme : « M. Mbappé a continuellement attaqué le club à chaque occasion. Le joueur a agi de mauvaise foi ». Le PSG dénonce « une exploitation de la confiance que le Paris Saint-Germain lui avait accordée ».

Un parcours judiciaire déjà mouvementé

Avant d’arriver aux prud’hommes, le conflit a connu de multiples rebondissements devant différentes instances. Le 11 septembre 2024, la commission juridique de la LFP tranche en faveur de Mbappé. Elle ordonne au PSG de verser les 55 millions d’euros réclamés. Le 25 octobre 2024, la commission paritaire d’appel confirme cette décision.

Le PSG refuse catégoriquement de payer et annonce qu’il contestera devant d’autres juridictions. Le club fait savoir publiquement qu’il « ne paiera pas les sommes en cause et demeure dans l’attente d’une décision de justice ».

Le 11 décembre 2024, la commission de discipline de la LFP juge irrecevable la saisine formée par Kylian Mbappé. Cette décision s’explique par le fait que le PSG avait assigné la LFP devant le tribunal judiciaire de Paris. Cela rend la procédure disciplinaire non recevable. Le club se déclare « très satisfait » de cette décision qui permet au litige d’être jugé devant une juridiction classique.

En janvier 2025, la commission supérieure d’appel de la FFF juge également irrecevable le recours de Mbappé. Sollicitée par le clan Mbappé pour alerter l’UEFA, la FFF refuse de transmettre des éléments à l’instance européenne.

Début avril 2025, Mbappé obtient le droit de pratiquer une saisie conservatoire à hauteur de 55 millions d’euros sur les comptes du PSG. Dans les faits, seuls 14 millions d’euros ont pu être saisis effectivement. Le 12 mai 2025, le PSG contre-attaque devant le Tribunal judiciaire de Paris pour faire annuler cette saisie.

Un verdict attendu pour le 16 décembre

À l’issue de l’audience du 17 novembre 2025, le conseil des prud’hommes de Paris a annoncé qu’il rendrait sa décision le 16 décembre prochain. Cette date intervient deux jours après le match du Real Madrid face à Alaves.

L’audience a été particulièrement tendue. Elle a même dû être suspendue au début avant de reprendre, sans que les tensions ne s’apaisent pour autant. Kylian Mbappé n’était pas présent physiquement mais était représenté par cinq avocats, face aux sept conseils du PSG.

Les deux camps affichent leur confiance. L’avocate de Mbappé déclare : « Il attend la décision sereinement. Il a confiance dans la justice de son pays ». Le PSG, de son côté, estime avoir présenté « des éléments démontrant que le joueur a agi de mauvaise foi ».

Plusieurs mois seront probablement nécessaires avant qu’une décision définitive ne soit rendue, car des appels sont attendus quelle que soit l’issue. En parallèle, une audience au tribunal judiciaire de Paris, initialement prévue en mai 2025, a été repoussée.

Un conflit qui dépasse le simple cadre financier

Au-delà des sommes astronomiques en jeu, ce procès révèle les tensions croissantes entre les joueurs stars et les clubs dans le football moderne. Le conflit illustre la difficulté de faire coexister les attentes sportives et commerciales des clubs avec les ambitions individuelles des joueurs.

Pour Mbappé, il s’agit de faire reconnaître un préjudice subi et de créer un précédent juridique pour lutter contre les pratiques de mise à l’écart. Pour le PSG, l’enjeu est d’éviter de payer une somme colossale et de défendre le principe selon lequel les engagements oraux ont une valeur dans les négociations contractuelles.

Le verdict du 16 décembre 2025 pourrait marquer un tournant dans l’histoire du football français. Si la requalification en CDI était prononcée, elle créerait une jurisprudence majeure susceptible de remettre en question le système des CDD sportifs protégés par la loi de 2015. Les clubs devraient alors repenser entièrement leur gestion des effectifs et leurs relations contractuelles avec leurs joueurs.

Quoi qu’il arrive, ce bras de fer judiciaire à plusieurs centaines de millions d’euros restera comme l’un des litiges les plus spectaculaires et les plus emblématiques du football européen. Il illustre la nouvelle réalité d’un sport où les enjeux financiers ont pris une dimension sans précédent, et où les batailles se livrent désormais autant dans les prétoires que sur les terrains.


Résumé de l’article Procès Mbappé-PSG

Le procès opposant Kylian Mbappé au PSG devant les prud’hommes de Paris le 17 novembre 2025 révèle un conflit d’une ampleur exceptionnelle. L’attaquant réclame 263 millions d’euros à son ancien club. Cela inclu 55 millions de salaires et primes impayés, 37,5 millions pour harcèlement moral et une demande de requalification de son CDD en CDI. Le PSG contre-attaque en exigeant 440 millions pour trahison contractuelle et perte de chance de transfert, notamment suite au refus par Mbappé d’une offre de 300 millions d’Al-Hilal en 2023.

Au cœur du litige, un prétendu accord oral d’août 2023. Le PSG affirme que Mbappé a accepté d’abandonner 55 millions en compensation de son départ libre. Ce que le joueur conteste formellement faute d’avenant écrit homologué. Les accusations de harcèlement incluent la mise à l’écart de Mbappé dans le « loft » durant l’été 2023 et des brimades visant son frère Ethan, retrouvé en larmes dans les vestiaires. La stratégie de Mbappé s’inspire du précédent Rabiot, qui avait obtenu la requalification de son contrat en CDI contre le PSG en 2025. Si Mbappé obtenait gain de cause, cela créerait une jurisprudence majeure bouleversant le modèle contractuel du football français. Le verdict est attendu le 16 décembre 2025, mais des appels prolongeront probablement le conflit pendant plusieurs mois.

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